Si le semis est la méthode la plus simple et économique pour reproduire une plante, ce n’est pas la plus rapide, sauf pour les espèces à durée de vie courte. Le bouturage offre la meilleure solution pour multiplier un végétal en grand nombre, rapidement, à partir d’un morceau de tige, de feuille ou de racine, et ceci avec la certitude d’avoir une descendance conforme au type d’origine. Nos conseils pour faire une bouture dans les règles de l’art.
Qu’est-ce le bouturage ?
Le bouturage fait appel à une particularité qu’ont les plantes -et que nous ne possédons pas, malheureusement, nous autres humains- de produire de nouvelles cellules propres à assurer leur survie et leur reproduction, à partir d’une petite partie d’eux-mêmes, détachée du pied mère. Grâce à des hormones végétales, les auxines, ces cellules se reproduisent très vite et en grand nombre. De plus, quand la partie prélevée se trouve dans l’impossibilité de se nourrir par elle-même, elle enclenche un processus de fabrication de radicelles qui vont puiser dans le support de culture les éléments nécessaires à sa croissance.
Quelles plantes peut-on bouturer ?
Il est possible de bouturer pratiquement toutes les espèces végétales. Toutefois, il y a quelques exceptions, pour lesquelles il est préférable d’employer d’autres méthodes (semis, greffage, marcottage, division…). Ce sont les arbres fruitiers, pommiers, poiriers, pruniers, cerisiers et quelques arbres comme le chêne ou le cèdre ou des plantes ornementales comme les fougères. De même, la grande majorité des fleurs annuelles ou des bisannuelles se reproduisent plutôt par semis.
Les vivaces font appel au bouturage, mais la division de touffe donne la plupart du temps de meilleurs résultats, surtout plus rapides. Pour ce qui est des plantes à bulbe ou à rhizome, l’éclatage des caïeux, des bulbilles ou des écailles qui se développent aux côtés de la plante mère s’apparente plus à une division qu’à un bouturage.
Cette méthode est la plus fréquemment employée pour les arbustes d’ornement et à petits fruits (groseilliers, cassissiers, figuiers), les plantes grimpantes et les arbres.
Pour ce qui est des légumes, le semis est majoritaire. Mais vous pouvez vous amuser à bouturer tomates, cresson de fontaine, courges, raifort, patate douce, avec d’excellentes chances de réussite si vous respectez bien les conditions de réalisation.
Quant aux plantes d’intérieur, elles sont nombreuses à faire appel au bouturage pour se multiplier, à partir d’une feuille, d’un tronçon de tige ou d’une extrémité de pousse.
Quel outil pour bouturer au jardin ?
Les outils pour planter la bouture
Comme pour tous les travaux de jardinage, il est indispensable de s’entourer d’une bonne panoplie d’outils pour bouturer dans les meilleures conditions, avec toutes les chances de réussite.
Le premier accessoire est le sécateur. Il sert à prélever la bouture sur le pied-mère. Prenez un sécateur à lames croisantes (à la manière d’une paire de ciseaux) et non à enclume où la lame venant prendre appui sur une contrelame écrase la base de la bouture. La coupe doit être nette. À défaut d’un sécateur, vous pouvez utiliser une serpette, sorte de couteau dont l’extrémité de la lame est courbe. Celle-ci peut être fixe, mais vous aurez plutôt intérêt à choisir un modèle à lame repliable dans le manche, plus pratique d’emploi, et plus facile à avoir en permanence dans le fond de la poche. Assurez-vous que la lame est toujours très bien aiguisée.
Le second outil dont on ne peut se passer pour faire une bouture est le greffoir. Il doit être aussi coupant qu’une lame de rasoir. Avec cet outil, vous allez préparer la bouture en recoupant en dessous de la taille faite avec le sécateur pour que la coupe soit franche, sans lambeau de tissus.
Le matériel pour faire pousser la bouture
Il vous faut ensuite du matériel pour élever la bouture. En premier lieu des caissettes, terrines, plaques alvéolées, pots en terre cuite ou en tourbe, c’est-à-dire des contenants à remplir d’un support de culture qui peut être du terreau pur ou, mieux, un mélange de terreau, de sable et de tourbe. Les caissettes alvéolées ainsi que les godets, le tout en tourbe, offrent l’avantage de pouvoir être mis directement en terre sans avoir à dépoter la jeune bouture avec le risque d’abîmer ses frêles racines. Certaines boutures demandant de la chaleur pour assurer la reprise, une mini-serre sera aussi très utile. Complétez votre panoplie avec un pulvérisateur et un petit arrosoir muni d’une pomme, d’un plantoir pour repiquer la bouture, d’un transplantoir pour la mise en place et vous serez parés pour bien travailler.
Quand faire des boutures ?
La meilleure période pour pratiquer une bouture dépend du type de plante à multiplier. Pour les plantes annuelles, bisannuelles et vivaces, la saison du bouturage se situe de préférence entre avril et mai. Pour les arbustes, il est préférable d’attendre juin, si vous réalisez des boutures herbacées. Les semi-aoûtées se font entre fin juillet et septembre. Enfin, les boutures à bois sec ont lieu entre octobre et janvier, lorsque la végétation est au repos et que la sève a quitté la partie aérienne de la plante. Pour ce qui est des boutures de racines, intervenez en hiver. Enfin, les plantes d’appartement se bouturent pratiquement toute l’année.
Certaines boutures sont faciles à reconnaître lorsqu’il reste quelques feuilles. Mais d’autres en sont dépourvues, et rien ne ressemble plus à un morceau de bois qu’un autre morceau de bois. Aussi, pour vous rappeler de quel végétal il s’agit, n’oubliez pas d’étiqueter vos boutures. Notez le nom de la plante (genre, espèce, variété) et la date à laquelle vous avez opéré. Ainsi, vous pourrez plus facilement vous repérer et savoir quand votre bouture aura des chances d’avoir émis des racines.
Comment réussir ses boutures ?
Pour réussir vos boutures, il est nécessaire que le processus de fabrication des cellules se mette en marche. Plusieurs conditions doivent être réunies pour que cela fonctionne.
La chaleur
C’est la chaleur qui déclenche le phénomène de bouturage. Vous devez donc, impérativement, donner de la chaleur à vos boutures. Pour cela, utilisez une mini serre, à défaut d’une serre, ou installez-les dans une pièce chauffée, à température constante. Il faut, en effet, éviter les écarts. Plus l’atmosphère sera confinée, meilleures seront les chances de réussite, c’est pourquoi on parle souvent de placer les boutures « à l’étouffée ». Un minimum de 18 °C est requis, mais l’idéal est d’avoir 22 °C en permanence.
L’humidité
Cette condition est liée à la première. Il importe en effet que la chaleur soit accompagnée d’une forte hygrométrie. Les plantes ont un énorme besoin en eau, leurs cellules en contenant une très grande proportion. Pour maintenir cette atmosphère humide, deux fois par jour, le matin et le soir, pulvérisez une eau à température ambiante sur vos boutures.
Aérez cependant votre mini serre, car l’humidité est souvent la cause d’une apparition de moisissures, contraires au bon développement des boutures. Nettoyez de temps en temps les vitrages.
La lumière
Troisième point important, il faut que vos boutures bénéficient d’un maximum d’éclairement. Sans luminosité, les boutures s’étiolent, s’allongent et perdent leur coloration. Cela peut aller jusqu’à leur disparition. Placez vos boutures près d’une source lumineuse, qui peut être naturelle – une fenêtre, par exemple – ou artificielle, en utilisant des kits d’éclairage. Attention toutefois à ne pas provoquer de brûlures sur les feuilles lorsque celles-ci sont recouvertes de gouttelettes d’eau. Il faut un minimum d’une dizaine d’heures de forte luminosité par jour.
Comment bouturer ?
Tous les végétaux ne se bouturent pas de la même façon. Certains se reproduisent simplement à partir d’une feuille ou d’un fragment de feuilles, pour d’autres, il suffit d’un morceau de racines. Mais, plus généralement, c’est une portion de tige, prise au milieu ou en extrémité qui est employée.
Des boutures dans l’eau
Il est possible, avec certaines plantes, de réaliser ses boutures dans de l’eau. C’est le cas du cypérus, du laurier-rose, du tradescantia, par exemple. Lorsque les racines sont suffisamment nombreuses, effectuez un rempotage intermédiaire avant de les planter définitivement dans un pot ou en pleine terre. Utilisez un mélange léger composé de tourbe et de terreau de feuilles, dans des pots en terre cuite que vous placez à l’abri, sous un châssis ou dans une pièce moyennement chauffée, en n’oubliant pas de les arroser régulièrement.
La bouture de racine
On utilise cette méthode sur les végétaux qui ont tendance à émettre des pousses tout le long de leurs racines. Faites des boutures de racines sur l’acanthe, le phlox, le pavot d’Orient chez les vivaces, sur l’ailante, le catalpa, le paulownia et le marronnier parmi les arbres, ou encore sur le raifort dans le potager. Procédez en arrachant avec beaucoup de précaution le pied-mère. Utilisez une fourche-bêche plutôt qu’une bêche pour ne pas les couper. Enlevez ensuite la terre qui colle tout autour. Sélectionnez deux ou trois belles racines bien formées, dépourvues de toute blessure et coupez-les près du pied. Repérez bien le sens de la racine (départ de la plante et extrémité). Avec le greffoir, découpez des tronçons de 5 à 10 cm de longueur, en notant toujours le sens. Dans le support de culture, placez ces boutures dans le sens vertical, la partie qui se trouvait le plus près de la plante en haut. Laissez cette partie très légèrement sortie du substrat. Tassez avec les doigts tout autour et arrosez en pluie fine. La partie enterrée émettra de nouvelles racines tandis que le haut verra naître des bourgeons foliaires.
La bouture d’écailles
Certaines espèces bulbeuses développent, autour du bulbe, des écailles qui peuvent être séparées pour donner de nouvelles plantes. C’est le cas du lis, de la fritillaire ou de l’ornithogale.
Une fois le bulbe arraché et débarrassé de la terre, avec précaution détachez avec les doigts les écailles qui se sont formées. Plantez-les ensuite verticalement dans une terrine remplie d’un support très léger (sable et tourbe) en laissant dépasser la pointe. Au bout de quelques semaines, ces écailles se seront transformées en bulbes que vous pourrez ensuite planter dans votre jardin.
Les autres bulbes, comme les tulipes, les narcisses, émettent non pas des écailles mais des bulbilles. Procédez avec ces bulbilles comme avec les écailles.
La bouture de feuilles
Cette bouture est le plus souvent réalisée avec des plantes d’intérieur dont certaines espèces émettent des racines à partir de cellules méristématiques (qui se divisent rapidement) situées dans les tissus vasculaires. Il suffit de mettre en contact le limbe, les nervures ou la base de la feuille avec le support de culture pour que le phénomène se produise. Le saintpaulia, le bégonia à feuilles, la sansévière le cypérus sont faciles à reproduire avec cette méthode. Il suffit parfois même d’une portion de feuille.
Avec un greffoir, détachez une feuille du pied-mère. Choisissez-la saine, bien formée, colorée, pas trop âgée, ni trop récemment formée. Si sa taille le permet, posez-la sur une surface plane et découpez des portions de 2 à 4 cm de côté, chacun d’eux ayant au moins une ou deux nervures apparentes. Sinon, gardez la feuille entière. Retournez-la et faites des entailles sur les nervures. Posez ensuite ces morceaux de feuilles bien à plat sur le substrat, en les maintenant éventuellement avec un petit caillou. La partie de nervure entaillée doit être parfaitement en contact avec le support de culture. Mouillez et placez à la chaleur. Pour les petites feuilles comme celles du saintpaulia, piquez le pétiole dans le substrat après avoir entaillé la base de la naissance de la feuille. Pour la sansévière, il suffit de découper la feuille en tronçons et de les piquer verticalement dans une terrine pour voir apparaître des boutures à la base de chaque feuille. Pour ce qui est du cypérus, prenez une extrémité de tige. Coupez les feuilles pour ne conserver qu’une rosette large de 5 à 6 cm. Retournez cette rosette et placez-la dans un verre rempli d’eau. Les racines apparaîtront à la base des feuilles.
La bouture d’œil
Ce type de bouture n’est pas très courant, mais il est employé lorsque l’on dispose d’une plante de petite taille sur laquelle on ne peut pas prélever de nombreuses feuilles ou tronçons de tige. Il consiste à ne bouturer que des portions de tige sur laquelle ne figure qu’un seul bourgeon (œil). On taille le rameau environ 1 cm au-dessus du bourgeon et 3 à 4 cm en dessous. La bouture est ensuite placée légèrement en biais, l’œil dépassant légèrement le niveau du support de culture. Le bourgeon développera une pousse tandis que des racines naîtront à la base de la bouture.
La bouture de tige
C’est la plus courante utilisée aussi bien pour les végétaux d’ornement que pour les plantes d’intérieur. Lorsqu’elle est pratiquée sur des plantes à tige molle (annuelles ou vivaces), elle est dite herbacée. Sur les végétaux dont le rameau se trouve entre la phase molle et la phase ligneuse, la bouture est appelée demi-aoûtée. Enfin, quand elle est faite pendant le repos de la végétation, sur des rameaux ligneux qui ont perdu leurs feuilles, la bouture est à bois sec.
La bouture simple
D’une longueur de 10 à 20 cm, elle est prélevée à l’extrémité d’une pousse de l’année ou sur une portion de tige. Avec le sécateur, coupez juste en dessous du point d’empattement d’une feuille, puis supprimez une partie du feuillage pour limiter l’évaporation. Avec le greffoir, retaillez la base pour que la coupe soit nette, puis trempez celle-ci dans de la poudre d’hormones. Piquez la bouture verticalement dans le support de culture et placez-la dans une atmosphère chaude et humide (mini-serre, par exemple).
La bouture à talon
Sur cette bouture, on laisse à la base une partie de l’écorce et du bois de la plante mère sur laquelle elle est prélevée. Cette opération se pratique avec un greffoir et beaucoup de précaution, car le talon doit présenter une coupe franche. Cette méthode favorise une meilleure émission de racines. On place la bouture dans un mélange léger, à la chaleur et à l’humidité. La bouture à talon est surtout employée pour multiplier les arbustes et les arbres.
La bouture en crossette
Elle est très proche de la précédente, mais au lieu de garder un morceau d’écorce et de bois, on coupe carrément la tige porteuse de la bouture de part et d’autre de la base de cette bouture. L’avantage est que cette petite portion de tige constitue une réserve de nourriture. On l’emploie donc pour les espèces qui sont longues à émettre des racines ou quand les tiges sont creuses. C’est le cas de la vigne, par exemple.
La bouture de tronçon de tige
Employée pour certaines espèces de plantes d’intérieur, comme le dieffenbachia, le dracaena, ou encore le lierre, cette méthode consiste à découper une tige du végétal en plusieurs tronçons de 5 à 6 cm de longueur, chacun d’eux comportant au moins deux ou trois nœuds (indiqués par l’emplacement d’un empattement de feuille). Sous ces nœuds, pratiquez une légère entaille de la tige. Chaque portion est ensuite placée à plat sur le support de culture, à la chaleur et à l’humidité. Les racines se développent au niveau de l’incision.
Il est tentant, lorsqu’on se promène dans la nature, de vouloir ramener chez soi une plante que l’on a particulièrement admirée. Prélever une bouture est très facile. Mais toute chose a un propriétaire, qu’il s’agisse d’un particulier ou d’une collectivité. Aussi, pour ne pas avoir d’ennui, n’oubliez pas de demander l’autorisation avant de vous servir ! Et si vous ne trouvez pas ce propriétaire, passez votre chemin…
Comment protéger ses boutures ?
Les boutures sont fragiles. Surveillez-les constamment. Elles sont assez rarement attaquées par des insectes, pucerons, mouches, ou des acariens, mais les maladies cryptogamiques sont courantes, notamment le pythium qui provoque la fonte des semis. La base de la bouture ramollit, s’affine, prenant une couleur rougeâtre avant de devenir noire. C’est la mort certaine. Le plus grave est que la contamination est très rapide et toute votre culture est envahie en quelques jours. Pour éviter ce problème, employez un support de culture désinfecté que vous pouvez traiter avec un fongicide. Passez aussi un coton imbibé d’alcool à 90° sur vos outils de coupes. Un dernier point, faites attention aux limaces et aux escargots, très attirés par l’humidité ambiante et la chaleur.